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Entretien avec Charlotte Renouprez à propos des dispositifs d'exclusion des sans-abri dans l'espace public

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Dans le cadre de la Journée mondiale de la justice sociale, Fedactio se penche sur la problématique du sans-abrisme et de l’exclusion sociale en Belgique. À cette occasion, Mme Charlotte Renouprez, l’une des fondatrices de l’ASBL ArtiCulE et du projet DesignForEveryone a accepté de répondre à nos questions. 

Ce 20 février, nous célébrerons la Journée mondiale de la justice sociale. Cette journée est l’occasion pour Fedactio de promouvoir une société fondée sur l’égalité des droits et la possibilité pour tous les êtres humains de bénéficier du progrès social et économique, et ce sans discrimination de genre, d’ethnie, de religion, d’âge, de handicap ou encore de statut social. Cela implique d’assurer la dignité, la stabilité et des perspectives pour tous les citoyens. C’est pourquoi Fedactio a décidé de soulever la problématique de l’exclusion sociale et plus spécifiquement du sans-abrisme. S’il est difficile d’obtenir des chiffres précis, selon le dernier dénombrement réalisé en 2014 par La Strada (centre d'appui au secteur bruxellois de l'aide aux sans-abri) plus de 2.600 sans-abri ont été recensés à Bruxelles. Aujourd’hui, les dispositifs anti-SDF sont bien plus nombreux qu’on le pense. Le projet DesignForEveryone vise à neutraliser ces dispositifs et à sensibiliser le grand public à cette problématique. 

Fedactio : Pourriez-vous nous présenter votre projet DesignForEveryone ?

Charlotte R. : DesignForEveryone interroge la manière dont l'aménagement de l'espace public inclut ou exclut certains usagers, en particulier les SDF. Initialement, c’est une initiative de Laurent et moi qui sommes tous deux professionnels de l’éducation permanente. Nous sommes actifs depuis septembre 2018, mais nous avons commencé à nous questionner après la visite d’Angela Merkel à Bruxelles en 2017 où les sans-abri ont été priés de partir et des grillages ont été placés. Avec un collectif de citoyens, ça a été le point de départ de la réflexion sur l’utilisation de l’espace public. C’est à ce moment qu’on s’est dit qu’il fallait qu’on se réapproprie l’espace public et permettre aux citoyens, aux passants de se rendre compte que ces grillages, ces arceaux ou ces picots ne sont pas innocents. C’est à ce moment qu’on a décidé de créer l’ASBL ArtiCulE pour Art, Culture et Éducation permanente. L’idée est d’organiser des événements à caractère artistique ou culturel pour interroger la réalité sociale dans une visée d’éducation permanente. 
DesignForEveryone n’est qu’un des projets de l’ASBL, mais nous entendons développer nos activités. Outre les interventions dans l’espace public, nous organisons aussi des expos photo qui constituent une autre facette du projet.

Vous voulez provoquer le questionnement sur la précarité sociale ?

Sur la précarité sociale, mais surtout sur le type de réponses données face à cette situation. Les dispositifs anti-SDF ne sont pas appropriés. Ils constituent une réponse sécuritaire qui ne résoud pas du tout le problème de la précarité sociale, mais ne fait que le déplacer. Les sans-abri restent dans la rue. Il y a d’autres réponses, des mesures structurelles, qui pourraient permettre aux sans-abri de sortir de la rue et en amont empêcher les gens d’y tomber comme l’encadrement des loyers, la lutte contre la précarisation de l’emploi... Alors que ces dispositifs ne font que rendre la vie en rue un peu plus difficile.

Quel est votre mode opératoire ? Comment procédez-vous lors de vos actions ? 

Dans un premier temps, on repère un endroit où la volonté d'empêcher les gens de rester, de se coucher, de s'asseoir etc. est explicite. Nous devons également avoir les compétences pour intervenir parce que ni Laurent ni moi ne sommes designers. Pour obtenir un bon résultat, nous allons tout d’abord prendre des mesures, des photos, puis construire une structure dans notre atelier et venir l’installer. Nous tirons profit des réseaux sociaux : jusqu’à présent nos structures ne restent que quelques heures, et c’est donc grâce aux réseaux sociaux, aux médias, à toutes les vidéos qui circulent qu’on peut avoir une certaine visibilité, que des gens prennent conscience de l’existence de ces dispositifs. Sans les réseaux sociaux ça aurait peut être moins de sens.

Vous mettez un point d’honneur à éviter de dégrader l’espace public ?

Oui, nous mettons un point d’honneur à ne rien faire d’illégal, notre but n’est pas de dégrader quoi que ce soit. Notre objectif est avant tout de provoquer la réflexion, c’est pourquoi nous laissons un petit mot d’explication à chacune de nos interventions. On nous demande souvent pourquoi nous n’allons pas directement interpeller les pouvoirs publics, ce à quoi nous répondons que selon nous, la sensibilisation des citoyens a davantage d’impact. Notre objectif est de rendre visible l’invisible, comme le côté fourbe de certains aménagements. Derrière ces dispositifs se cache une certaine vision de la société et une certaine volonté d’exclusion des plus démunis.

Avez-vous des partenariats ? Des synergies se mettent-elles en place avec d’autres associations ou professionnels ?

C’est une volonté. Nous aimerions également rencontrer des professionnels travaillant dans le secteur du sans-abrisme et qui connaissent mieux que nous ce milieu. Nous avons fait germer l’idée autour de l’éducation permanente et du questionnement, mais souhaitons voir grandir le projet et toucher plus de professionnels. D’ailleurs, la dernière personne qui nous a rejoint a une formation de designer.
En outre, nous assisterons ce samedi 23 février à l’Assemblée générale de “Droit à un toit” (https://droitauntoit-rechtopeendak.brussels), sur invitation de DoucheFlux, association basée à Anderlecht qui propose des douches aux sans-abri. Comme c’est une assemblée ouverte, beaucoup d’acteurs de terrain y reviendront sur la question du logement et du sans-abrisme. Nous y piloterons un groupe de travail sur le détournement des dispositifs anti-SDF, l’occasion de rencontrer des gens qui travaillent sur les mêmes problématiques comme par exemple “Job Dignity” [N.D.L.R. incubateur de projets destiné aux femmes SDF]. Nous ne travaillons pas directement ensemble, mais nous restons en contact. Nous sommes également en contact avec la Strada. Il y a des choses qui se mettent en place. 

Donc globalement vous recevez plutôt du soutien ?

Globalement, le soutien que nous recevons est plutôt positif. Cependant quelques personnes ne comprennent pas notre démarche et nous disent : “je n’ai pas envie d’avoir un sans-abri qui pue à côté de moi pendant que j’attends le métro”. Recevoir ce type de commentaires nous intéresse également, car nous pouvons par la suite les déconstruire. Il nous arrive de recevoir des mails très négatifs de la part de personnes qui nous disent : “vous devriez utiliser votre temps à faire des choses utiles”. Puis, après quelques échanges, ils comprennent notre démarche et la trouvent intéressante. On pourrait qualifier notre démarche de pédagogique.

Pouvez-vous nous parler des “Pics d’or” en quelques mots ?

La Fondation Abbé-Pierre [N.D.L.R. fondation française d’utilité publique pour le logement des défavorisés] nous a invités à la cérémonie des Pics d’or qui attribue des prix ironiques aux “meilleurs” dispositifs afin d’en dénoncer l’horreur. À Paris, les dispositifs anti-SDF sont plus violents qu’à Bruxelles où ils sont plus sournois. La Fondation nous a proposé de faire une intervention pendant la cérémonie et de présenter nos actions. Après la cérémonie, nous avons relevé un petit défi en redesignant l’un des dispositifs “recompensés”.

Certaines installations sont justifiées par des arguments hypocrites “des accoudoirs pour le confort, des grillages pour la sécurité…”. Êtes-vous confrontés à ce type d’arguments ?

Par rapport aux accoudoirs, on nous a souvent dit que c’était pour permettre aux personnes à mobilité réduite et aux personnes âgées de pouvoir s’appuyer pour se relever, sauf que la plupart des accoudoirs ne font que deux centimètres de haut et n’aident donc pas ces personnes. Un tunnel avait également été totalement bouché car de nombreux sans-abri y dormaient et la justification de la sécurité avait été invoquée. Cependant, les riverains avaient mis sur pied un réseau solidaire pour leur offrir de la nourriture. On voit donc clairement qu’il existe des initiatives bien plus positives que de détruire ou d’empêcher l’accès à certaines zones de l’espace public. 

Pourriez-vous présenter votre exposition en quelques mots ?

Nous avons demandé à deux photographes de porter un regard sur l’aménagement urbain à Bruxelles. L’idée est de prendre le temps de réfléchir aux conséquences de ces aménagements sur le vivre-ensemble. Une première édition a été organisée au Brass'Art à Molenbeek durant laquelle nous avons reçu une centaine de visiteurs en l’espace d’un weekend. Les visiteurs étaient très enthousiastes et nous ont confié qu’avant l’expo, ils ne se questionnaient pas sur l’aménagement de l’espace public mais qu’après avoir vu nos photos, ils avaient ouvert les yeux sur cette problématique. Pour nous c’est une victoire.
Une seconde exposition aura lieu chez nos partenaires de Garcia Lorca (Rue des Foulons 47/49, Bruxelles). Le vernissage aura lieu le 16 mars à 18h30 et l’exposition se déroulera du 17 au 21 mars. Des visites guidées seront organisées par “Les équipes populaires”, une ASBL du MOC. Vous trouverez toutes les infos sur le site de notre ASBL ArtiCulE : https://bit.ly/2BK2I6E


En mettant en avant la question de l’exclusion sociale, Fedactio entend contribuer à une société plus cohésive et inclusive. Il était important pour nous de couvrir cette journée mondiale en présentant des acteurs de terrain tentant de sensibiliser au quotidien la population belge à la problématique du sans-abrisme, ainsi qu’aux politiques urbaines contribuant à renforcer l’exclusion sociale des SDF. Notre Fédération poursuit des objectifs communs à travers ses plateformes “Cohésion sociale et dialogue” et “Solidarité et aide humanitaire” et il est donc logique que nous mettions en avant de telles initiatives qui, en éveillant la conscience collective, ne pourront qu’avoir des répercussions positives sur ce type de questions sociétales. À l’image du collectif DesignForEveryone, agissons pour un monde plus juste.
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